Mais on en vient à bout tout de même. Je suis acteur. Sorti le 4 octobre 2017, Le Sens de la fête est un des derniers films avec Jean-Pierre Bacri en vedette. Sur mes trente-cinq films, il y en a huit que je n’ai jamais vus. L'acteur et scénariste français Jean-Pierre Bacri est décédé lundi d'un cancer à l'âge de 69 ans, a indiqué à l'AFP son agente Anne Alvares-Correa. Rien à faire, il fallait ranger, cacher même, le cliché si l’on voulait poursuivre la rencontre... A 53 ans, trente-cinq films, une dizaine de scénarios et pièces de théâtre, le héros de Comme une image, d’Agnès Jaoui – Prix du scénario au dernier festival de Cannes –, continue de n’aimer guère la sienne. Et j’ai pris peur, j’ai tout quitté, je suis monté à Paris. Commedia, Francia, 2017. La grâce, Mort de Jean-Pierre Bacri: ses huit films (et huit rôles) les plus marquants, Jean-Pierre Bacri, mille nuances du misanthrope bourru. Je n’aime que le peu, le moins. Pour moi, c'est ça la classe. Nous entrons dans une ère où l'homme cultive et multiplie tous les moyens de ne pas mourir (médecine, confort, assurances, distractions), tout ce qui permet d'étirer ou de supporter l'existence dans le temps, mais non pas de vivre, car l'unique source de la vraie vie réside au-delà du temps et contient aussi la mort dans son unité. En 1962, la famille émigre à Cannes, dans le Sud-Est de la France, où Jean-Pierre Bacri entreprend des études de lettres. A la distance secrètement blessée, pudiquement ironique. Et une nuit, j’ai dépassé les bornes : j’ai perdu l’équivalent de 4 000 euros que mes partenaires sont venus me réclamer au guichet. La rédaction de Télépro en confinement, mais toujours à votre service ! A quoi ça sert de gagner de l’argent si ce n’est pas pour en profiter ? Et je n’ai jamais souhaité retourner à Castiglione, où je suis né, à 40 kilomètres d’Alger. Celui que j’espère être, que certains ont la gentillesse de me dire que je suis, risquerait tellement d’être humilié ! Mais m’entendre donner des leçons aux autres me fait mal à l’oreille... Enfin... C’est vrai qu’aujourd’hui je me fiche de plaire à tout le monde. On ne peut s’empêcher d’être complaisant, surtout quand on veut jouer les modestes et ne pas paraître arrogant. Son livre de chevet était L’Homme sans qualités, de Robert Musil. Je préfère séduire ceux qui se foutent de ces mascarades, de ces divertissements prédigérés dont on sort honteux : quand on me réduit, je me sens réduit. L'acteur français est mort des suites d'un cancer à l'âge de 69 ans. Au tout début, on s’installait chacun dans notre coin, puis on comparait. Jean-Pierre Bacri n’est pas à proprement parler un acteur boulimique, ce qui rend ses apparitions à l’écran précieuses. C’est ça qui nous fait écrire Agnès Jaoui et moi : la lâche soumission à la loi du plus grand nombre. Aucune nostalgie de votre enfance en Algérie ? On se souvient de ses émois amoureux dans Les Sentiments (2003), de Noémie Lvovsky, de son charme naïf et maladroit dans Le Goût des autres (2000), premier film réalisé par Agnès Jaoui, et le plus grand succès public du tandem à ce jour. Et je m’interroge. Redécouvrez la première apparition au cinéma de Jean-Pierre Bacri, dans un film avec (et produit par) Alain Delon, intitulé "Le Toubib", sorti en 1979. On avait insisté ; il était devenu silencieux, pâle, presque vert sous le bronzage. Des conseils quotidiens, des actualité, les grilles de plus de 80 chaînes avec photos, bandes annonces et commentaires, les diffusions Netflix en Belgique, des vidéos exclusives, des jeux et des concours. Je rêverais que notre vie sociale soit comme un match de foot, où un arbitre viendrait constamment distribuer à l’un ou à l’autre un carton jaune ou rouge pour l’empêcher de faire des bêtises ! Mon père, d’ailleurs, facteur de son métier, m’avait toujours consciencieusement répété qu’il n’y avait aucune différence entre un président de la République et un balayeur. Télépro reste fidèle au poste, explique la rédactrice en chef Nadine Lejaer. C’est oublier, en effet, toutes les subtilités d’un jeu en points de suspension, où le non-dit (que le dramaturge et coscénariste nous pardonne...) importe davantage que le dit, où le poids d’un lent regard noir, d’un frémissement des lèvres en suggère plus que n’importe quelle réplique. Qu’est-ce que j’y retrouverais ? Le poker, la tension, le suspense, n’était-ce pas déjà du théâtre ? Je ne milite pas pour autant. Tout le monde a ri... La première minute d’humiliation passée, j’en ai joué. 10,794 were here. Je suis pour les jardins secrets, pour la vie privée. Ne pas mourir est une chose. Notre service clientèle à votre service ! En attendant de revenir plus longuement sur sa carrière, voici un grand entretien qu’il nous avait accordé en 2004. Le « véritable » amour repose surtout sur la loyauté, la droiture, le respect de l’autre. Je me souviens qu’au moment des répétitions d’Un air de famille elle m’a dit : « Fais attention, tu commentes chacune de tes répliques avec une mimique. J’en ai marre de ces étiquettes, de ces généralités. Oui, si j’avais un deuil proche, j’interromprais sans complexe le tournage ou la représentation du soir : rien n’est plus important que ce que je décrète important. ", s'était emporté l'acteur auprès de l'AFP en 2015. Jean-Pierre Bacri s'est éteint ce lundi 18 janvier, à l'âge de 69 ans. Je vois des amis, je lis, je rattrape mes retards, l’oeuvre de Diderot, par exemple... Je sais seulement qu’en mai 2005 je jouerai aux Amandiers de Nanterre Les Aventures du brave soldat Schweyk, de Bertolt Brecht, dans une mise en scène de Jean-Louis Martinelli ; et que je vais recommencer à écrire notre prochain film avec Agnès sur le thème de la culpabilité dans le couple : la pitié dangereuse de l’autre, et où elle peut conduire. Il était aussi artiste à revendiquer sa paresse, mais il ne cessa jamais de jouer, d’écrire. Acteur délicat et intense, allergique aux contraintes et aux conformismes, il était aussi le co-auteur de plusieurs films avec Agnès Jaoui, comme “Cuisine et dépendances” et d’“Un air de famille”. Car il connaissait si bien la chanson de la comédie humaine. Jean-Pierre Bacri est mort lundi d'un cancer à l’âge de 69 ans, a annoncé son agente à l’AFP. Ces dernières années, l'acteur tournait moins, se limitant à deux films par an et revendiquant son droit à la paresse. Jean-Pierre Bacri s’était détourné brutalement. J’essaie de m’interroger, de garder l’esprit critique. Durata 117 min. Plus concrètement, d’essayer à chaque coin de rue d’être attentif à l’autre, à l’étranger, d’être tolérant. En 1962, la famille émigre à Cannes, dans le Sud-Est de la France, où Jean-Pierre Bacri entreprend des études de lettres. Comme l’écrit Diderot à Sophie Volland, il faut « ou se renfermer, ou s’habituer à avoir de la poussière dans les yeux quand il fait grand vent ». Chabrol sur Netflix : quels écrivains se cachent derrière les huit films ajoutés au catalogue ? Je reste le plus libre possible. Non, la révélation, je l’ai eue en suivant par hasard une fille dans son cours de théâtre. Jean-Baptiste Para : “Un poème donne toujours à entendre une voix passée au fin tamis du silence”, Quand la fac est en vrac, Frédérique Vidal traque “l’islamo-gauchisme”, Le retour des étudiants à l’université un jour par semaine : un effet d’annonce et puis quoi ?Â, Quand scientifiques et artistes unissent leurs forces. Jamais je ne deviendrai réalisateur comme Agnès. Très vite, les "Jacri" -- comme les surnommait Resnais -- mettent en commun leur humour acide et leur don d'observation pour écrire à quatre mains. Mais le mensonge par omission est souvent la meilleure solution. Interview du 14 décembre 2014 : Onze films en quinze ans. Disparition. Ça a été très simple, comme souvent au théâtre, au cinéma, pour les acteurs qui travaillent ensemble. Ni l’étiquette d’éternel bougon qu’on lui colle depuis Cuisine et dépendances, en 1991, où il s’était écrit sur mesure, avec Agnès Jaoui déjà, ce rôle de Georges, sombre et noir, rebelle et râleur, qui pestait sans fin contre les fausses valeurs. Tout en me bourrant le crâne sur le sens de la responsabilité individuelle, l’esprit de justice, le fait de n’avoir qu’une parole, de ne jamais s’accaparer ce qui ne vous revient pas : une espèce de névrose de la droiture que j’ai gardée. Comment, depuis Cuisine et dépendances, écrivez-vous ensemble ? Je n’aime guère le travail acharné. Je ne regrette aucun des films où j’ai joué, je n’en mythifie aucun non plus. Je ne sacralise pas ce métier. Et vous savez, je suis de gauche toute la journée, pas besoin d’être un héros pour ça : il me suffit de considérer l’intérêt général avant le particulier, de préférer le respect de l’individu aux lois du marché. Elle m’a beaucoup apporté. Et j’attends. Mais les enfants vivent ça différemment, ils jouent, ils s’habituent à tout. J’ai été ravi d’être adulte. Une certaine futilité, un goût stupide de l’amusement, des plaisirs gamins... Une paresse de cancre aussi. On peut beaucoup sur soi. Comme s’ils avaient appris leur texte ! Il faut que tout soit fait vite. C’est mon âme soeur. Une vie d’acteur est nourrie de l’accumulation d’expériences, quelles qu’elles soient. C’est moi que je n’aime pas. On va découvrir sa cruauté douloureuse dans Comme une image où, en écrivain à succès atrabilaire, il tyrannise son entourage…. “Amiante, un espoir de justice”, sur France 5 : “L’État a continué de fermer les yeux”, Docurama : “Amiante, un espoir de justice”, Céleste Brunnquell, incandescente adolescente dans “En thérapie” sur Arte, Benshi, la plateforme vidéo jeunesse qui va ravir les petits cinéphiles, De Jacques Higelin à Kanye West, les airs de jeunesse d’Hervé, Jeu vidéo pour enfants : “Tohu”, une chic mécanique pour remuer ses méninges, L’historien Éric Michaud révèle les “liens secrets” entre le Bauhaus et le nazisme, À Montreuil, un escape game hanté se transforme en “véritable cauchemar”, Où bien manger à Paris : les délicieux gâteaux de la pâtisserie du Septime, “Punk’s Not Dead” sur KuB : une balade à Rennes sur les crêtes du punk français, Mes années 10, #125 : The Drums, Foxygen, Sean Rowe… La playlist secrète de François Gorin, Isabel Sörling, la Suédoise folk devenue chanteuse de jazz français. Une seconde carrière de scénariste. ": l'acteur Jean-Pierre Bacri est mort, C8 en Belgique : les premiers chiffres d'audiences, «Une planète parfaite», le Soleil brille pour tout le monde, Amiante : le poison invisible tue toujours, «Jumanji : Bienvenue dans la jungle», en version 2.0, Paris: une antiquaire d'"Affaire conclue" cambriolée, Le DAB+, désormais première plateforme numérique pour écouter la radio, 5 films Netflix à voir à la Saint-Valentin, Marilou Berry : «Cette série, c’est un peu ma vie». Voyez donc comment, d’interview en interview, des acteurs, des artistes ou des politiques ne peuvent s’empêcher de se figer sur certaines phrases – leur propre langue de bois –, qu’on retrouve dans tous les articles. Etre « présent partout, visible nulle part », comme dit Flaubert. Mon école ? Après les morts récentes de Caroline Cellier, Claude Brasseur ou Robert Hossein, le cinéma français pleure encore la perte d'un comédien de grand talent. 2 Même malgré soi, on se donne toujours en spectacle. Il y avait un gars qui fumait sa clope juste là et qui a simplement levé un sourcil et s'est détourné. Il n’y a pas de fatalité. La littérature a-t-elle assassiné le polar ? Leur première pièce "Cuisine et dépendances" (1992) est un succès vite adapté au cinéma, tout comme "Un air de famille" (1996). Pas du tout ! Le scénario de Comme une image, écrit avec votre compagne Agnès Jaoui, montre à quel point la célébrité peut détruire un couple... Quand Agnès travaillait peu, quand j’étais encore plus connu qu’elle, les gens s’asseyaient littéralement sur sa tête pour me parler. J’avais attrapé le virus. "Il est mort en début d'après-midi", à Paris, a-t-elle précisé. Jean-Pierre Bacri est mort le 18 janvier 2021 à l'âge de 69 ans. Mais le grand tournant dans sa carrière, c’est grâce à une pièce de théâtre, Cuisine et dépendance en 1991, que Jean-Pierre Bacri le prend. Ni l’écrivain ni l’acteur. Je ne me sens pas pour autant leur porte-parole. Festival Travelling 2021 : c’est parti pour une exploration virtuelle de la Louisiane, Conversation virtuelle avec la réalisatrice américaine Kelly Reichardt. Article publié initialement dans Télérama N° 2853 du 18 septembre 2004, Retrouvez le meilleur de Télérama avec nos cinq newsletters : Ecrans & TV, La Quotidienne, Télérama Sortir Grand Paris, Télérama Soirée (abonné) et Télérama Week-end (abonné), “J’ai gardé une espèce de névrose de la droiture”, “Je rêverais que notre vie sociale soit comme un match de foot, où un arbitre distribuerait des cartons à l’un ou à l’autre pour l’empêcher de faire des bêtises.”, Jean-Pierre Bacri est mort : ce qui le mettait de bonne humeur ? Elle le mérite. Parfois catalogué comme l'acteur d'un seul rôle, celui de l'éternel bougon, il détestait pourtant qu'on lui colle "cette étiquette": "Je ne joue pas toujours des personnages râleurs ! Dans les rôles qu'il choisissait ou ceux qu'il écrivait avec Agnès Jaoui, Jean-Pierre Bacri pourfendait le sectarisme culturel, le conformisme, les chapelles, la servilité... C'est son père qui lui avait transmis cette morale, lors de son enfance à Castiglione (Algérie), où Jean-Pierre naquit en mai 1951. En 1962, la famille quitte l’Algérie pour s’installer en France, à Cannes. En 1977, il écrit sa première pièce, "Tout simplement", vite suivie de trois autres. La vie, l’humain l’emportent sur tout... Je n’ambitionne d’ailleurs de travailler avec personne, si célèbre soit-il. Dans Comme une image, Agnès a eu cette idée d’une relation père-fille très oedipienne, et d’un artiste bourré de convictions qui les perd peu à peu... Ensuite, on décortique longuement les relations possibles entre les personnages, on cherche des croisements entre leurs histoires, tout en essayant de traquer les clichés, les idées reçues. Il faudra attendre pour ça mon coup de coeur quand j’ai vu Michel Rocard, en 1978, à la télévision, après la défaite de la gauche aux législatives. Mais son talent n'éclate vraiment qu'au côté d'Agnès Jaoui qu'il rencontre en 1987 au théâtre dans "L'anniversaire" de Pinter. Il faut montrer le moins possible. C'est l'agent de l'acteur qui a fait part de la triste nouvelle, relayée en milieu d'après-midi par nos confrères de BFM TV. Quant à moi, j’ai toujours attendu qu’elle ait du succès. Le pied-noir type du Grand Pardon [le film d’Alexandre Arcady]. Quand il se rend à Paris et pousse la porte d'un cours d'art dramatique, c'est d'abord l'écriture qui l'intéresse. Surtout pour mes parents. Je préfère qu’on me mente aussi. Le prof à cheveux blancs, la solennité du passage des scènes, les élèves si attentifs aux règles de la diction, de la respiration... J’avais l’impression d’être dans Entrée des artistes, de Marc Allégret ; je trouvais ça démodé, mais j’étais fasciné... On m’a d’ailleurs demandé de dire quelque chose.